mercredi 20 juin 2012

J'suis pas bien

« C’est comme le raisin, si ça désaltère, il y a toujours des pépins. »

William Sheller
, J'suis pas bien    1981.
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L’homme arrive seul. Il ne semble pas très grand. Presque miséricordieux, dans son costume large et sombre d’où s’insurgent deux manches blanches lorsqu’il tend les mains vers cette foule, comme s’il allait prêcher, ou s’excuser par avance de quelques maladresses ou de quelque pensée inattendue.
Il semble moins seul, dès qu’il s’assied face à son piano, s'associant à ce grand instrument noir où s’illustrent les touches blanches entre quelques bémols et autres dièses, comme des dominos qui, réguliers, s’entrechoquent avec délicatesse dès qu’il tend les phalanges à leur rencontre.
Des souvenirs lui reviennent, et les loups de Sologne, la voisine Yvonne, les merles qui s’éveillent à l’aurore, construisent des histoires aussi vraies qu’elles ne sont pas qu’inventées. Une musique de chambre, une chanson d’automne, une autre lente, mènent de Genève à Vienne, simplement ; et l’homme ne semble toujours pas très grand, un tantinet miséricordieux, petit comme un caillou, à courir seul sur son piano et nous conduire dans son univers… où l’on est bien.
Un carnet à spirale, qui offrira ses notes, au cœur de juin, à qui le feuillettera.