lundi 23 juin 2014

Autoportrait de l'auteur en coureur de fond

« Enfin, le triathlon s'achevait. Je ne m'étais pas noyé, je n'avais pas crevé, je n'avais pas été piqué par une méchante méduse. Aucun ours affamé ne s'était jeté sur moi, aucune guêpe ne m'avait attaqué, aucun éclair ne m'avait atteint. Ma femme, qui m'attendait à la ligne d'arrivée, n'avait découvert aucune ténébreuse affaire me concernant. »

Haruki Murakami
, Autoportrait de l'auteur en coureur de fond   2007.
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Un autoportrait de l'auteur, mais pas une autobiographie. Un autoportrait de l'auteur, mais pas qu'en coureur de fond.
On retrouve Haruki Murakami (°1949 Kyōto), comme écrivain, comme penseur, un peu philosophe, un peu humaniste. Mais terriblement coureur de fond. À ne pas laisser s'achever une journée sans avoir avalé ses dix kilomètres de running, son quotidien est rythmé par des foulées régulières. Ce, depuis ses trente-trois ans, à l'âge où le Christ est mort, à « l'âge où Scott Fitzgerald a commencé à décliner. » À l'âge, où il a commencé à consacrer sa vie à l'écriture. À partir de ce jour, en écoutant, notamment, The Lovin' Spoonful dans son walkman, Haruki n'a cessé de courir. Son premier quarante-deux kilomètres, il l'accomplit sous le soleil caniculaire grec, retraçant alors, seul, la distance légendaire menant d'Athènes à Marathon, peinant, souffrant, soufflant, jurant, réalisant que « Rien dans le monde réel n'est aussi beau que les illusions d'un homme sur le point de perdre conscience. » 
Croit-il écrire sur la course — ou nous le veut-il faire croire —, qu'il parle de lui, de son activité d'écrivain, de ses doutes, de ses ambitions, autant avec humilité qu'avec, parfois, une petite pointe d'orgueil. À comparer la discipline qu'il s'inflige en tant que sportif, à celle nécessaire pour mener à bien un nouveau livre : concentration, hygiène de vie, respect de soi.
Participant à des marathons, des triathlons et
à diverses autres courses, Haruki Murakami s'est également essayé aux très longues épreuves comme les ultrafonds, ordonnant à ses muscles et ses jambes de le mener sur des distances de cent kilomètres. Probablement, dans ces exercices difficiles, où les efforts vont au-delà des forces supposées, pour se mieux connaître. Car, dit-il, « On a beau se poster nu aussi longtemps qu'on le souhaite devant son miroir, ce qui est l'intérieur ne s'y reflète pas. »
Un livre conseillé par Karin, lu en préparant le Tour de Mirandon ; course peyremalencque qui passe par Athènes et Marathon ; dit-on.