dimanche 23 février 2014

Lettres à sa fille

« Sous prétexte qu'ils se transmettent d'une génération à l'autre une vieille propriété infestée de punaises, ils ont dans l'idée qu'ils sont des aristocrates, alors qu'à parler net ce sont tout bonnement des indigents. »
Calamity Jane, Lettres à sa fille 1898.
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Ces lettres sont-elles authentiques ? Personne ne le pense sérieusement. Mais, hormis si l'on considère que Martha Jane Cannary (ca1856-1903) était illettrée, elles le pourraient, tant elles content avec une certaine vérité la vie d'une femme qui errait d'un endroit à un autre, qui acheva sa vie démunie, aveugle et rongée par les remords d'avoir abandonné sa fille, une vie qui pourrait ressembler à celle de ladite Calamity Jane.
L'auteure, qu'elle fut la célèbre pionnière aux pantalons d'homme ou une romancière qui eut aimé incarner son héroïne, décrit les Black Hills de l'Ouest sauvage, les Sioux, les Cheyennes, ses parties de poker, ses aumônes, ses boulots de conductrice de diligences ou d'infirmière, de nourrice, même, ainsi que le Wild West Show de Buffalo Bill, où elle joue son propre rôle. Elle évoque, tout au long de cette correspondance, ses fidèles amours pour Wild Bill Hickok, sa reconnaissance éternelle pour le père adoptif de sa fille, Jim O'Neil, son attachement à son cheval Satan, et ses pensées maternelles, pleines de regrets, pour sa Janey.
Les bourgeoises 
de Deadwood, qu'elle accuse de garder des squelettes dans les placards et d'engendrer des fratries de bâtards, sont des contemporaines qui comptent également, dans ses mémoires : « Je n'ai encore jamais tué personne, mais j'aimerais cogner sur la tête de certaines femmes de Deadwood » ; « Si j'étais un homme, il me suffirait de leur flairer une seule fois les aisselles pour être dégoûté. »
Ces vingt-sept lettres, qui s'échelonnent entre 1877 et 1902, ont été dévoilées près de quarante ans après la mort de Calamity Jane, en 1941, par celle qui se disait être sa fille Janey. Elles se lisent aisément, comme nous écouterions une vieille tante, accoudée à la table de sa cuisine, raconter sa pauvre vie, une existence hésitant entre ses heureuses bagarres dans les saloons avec les mégères de la ville et une vie "plus" chrétienne, à cuisiner son mince pie et son gâteau de 20 ans.
Un livre lu, en écoutant "La ballade de Calamity Jane", superbe album — qui n'est pas sans rappeler les ambiances de la musique du film "Dead Man", jouée par Neil Young —, composé et interprété par Chloé Mons, Alain Bashung et Rodolphe Burger.