dimanche 21 septembre 2014

Born to Run (Né pour courir)

« À la différence de Lance, les Tarahumaras ne refont pas le plein de sels minéraux avec des boissons d'effort. Ils ne réparent pas les dommages musculaires de l'exercice avec des barres hyperprotéinées. En fait, ils ne mangent pratiquement pas de protéines et ne se nourrissent pour ainsi dire que de maïs parfois agrémenté de souris grillées, leur friandise favorite. À l'approche d'une course, les Tarahumaras ne s'entraînent pas et ignorent l'affûtage. Le jour même, ils ne s'échauffent pas et ne s'étirent pas non plus. Ils se pointent simplement sur la ligne de départ en rigolant… et partent comme des dératés pour 48 heures. »

Christopher McDougall
, Born to Run (Né pour courir)   2009.
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Un jeune homme, beau, glabre et hâlé, le sourire affichant une joie et une aisance à la course, fend la vitesse d'une piste rocailleuse. Vêtu d'une ample chemise écarlate, d'un pagne clair et… de sandales de fortune, il ne ressemble à aucun des runners en-dossardés pris dans le même effort au sein d'une compétition. C'est une image. Celle de la couverture du livre. Mais elle revient, au long de ces centaines de pages, nous tenant en haleine, cardio à 200, nous accompagnant, pas à pas, foulée après foulée.
Le coureur est serein. On devine une allure maîtrisée, habituelle. Même s'il est parti comme un dératé, il court détendu. S'appuyant sur des descriptions particulières (anecdotes, historiques, non-dits) d'évènements sportifs (marathons, trails, ultra-marathons), McDougall avance dans son écrit et dans sa découverte des antagonistes, en même temps qu'il pénètre dans le pays sauvage d'un peuple que le lecteur ne connaît pas : celui des Tarahumaras, sis dans les canyons hostiles des montagnes mexicaines du Chihuaha.
De sa rencontre avec les Tarahumaras, McDougall ne sort pas indemne. Et nous ne sortons pas indemnes, après la lecture de son pavé. Ce livre est un must ! Une bombe ! McDougall n'est pas un anthropologue. Ni un philosophe, ni un hippie. Certainement pas un cardiologue ou un spécialiste des sports d'endurance extrêmes. McDougall, c'est Pierre Rahbi, avec la guitare à Bruce Springsteen, pour un concert final organisé dans une jungle aride ! McDougall n'est pas un idéaliste, ni un rêveur. Il n'est pas aussi fou que les coureurs dont il parle (les Emil Zatopek, Ana Trason, etc.), ni aussi sage que ses amis Tarahumaras.
Son écriture est façonnée comme une sortie en fractionné : les phrases suivent un rythme soutenu, qui nous mène d'un souffle en des récits passionnants, puis se scindent en des riffs 
électriques, vifs, détonants. Une tuerie. Si ce livre va enthousiasmer les amateurs de running, il va bousculer les autres, simples mortels. Les aventures humaines contées sont étonnantes. Les performances sportives sont narrées comme des chroniques surréalistes. Comme si un témoin averti rapportait les premiers pas de l'homme sur Mars, ou l'ascension de Mirandon par votre serviteur.
Un livre extraordinaire, exceptionnel, unique, déroutant, lu grâce à Miss Ceccano, en préparant ladite boucle mythique peyremalencque de juillet, et sans dévorer une — ou alors… une seule — souris, en guise de friandise.

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